Lundi matin.
Tartine et café qui barbouillent l'estomac, voiture, gare, train. Déjà toute une histoire : Prendre son billet au guichet automatique, avec plein de gens impatients derrière, une carte bleue au fond du portefeuille lui-même au fond du sac, pluie battante, destination strasbourg carte 12-25 1 personne 2ème classe aller simple valider non pas de ticket. Déjà ça, ça fatigue pour la journée.
Ensuite après le petit crouinch crouinch du compostage, hop hop on court sur le quai B (à obermodern, il n' y a que deux quais. Le A et le B) et là c'est l'horreur parce que le lundi matin à 7h il y a TOUT votre ancien collège qui est là aussi. Eux aussi ils font leurs études à Strasbourg. Et en général à 7h, surtout un lundi, on a quand même bof envie de dire bonjour à qui que ce soit et surtout pas à Machinette qui était à côté de vous en maths en sixième A. Mais si "salut ça va lol" le 5 février 2001 dans votre agenda c'était elle. Bref.
En fait, Machinette, ça fait toujours un petit pincement au coeur de la voir de loin comme ça avec son sac verni et ses petites bottines à talons. On a un peu envie de l'engueuler et de lui dire qu'elle trop jeune pour s'habiller comme ça, parce que même si elle a vingt ans comme nous hé bien pour nous elle est toujours en sixième A.
Le train arrive tout le monde se bouscule mais pourquoi faut-il que tout le monde prenne ce foutu train de 7h etc, ouf deux places de libre (d'ailleurs c'est toujours les places qui sont face à deux autres places qui sont libres, preuve que les gens DETESTENT se voir, se parler, et surtout le lundi), bref moi je m'en fiche tout ce que je veux c'est être à côté de mon papa, comme d'habitude on va parler de politique (encore plus en ce lendemain d'élections) et on va voir de la haine dans les yeux des gens parce que les alsaciens DETESTENT parler de politique, surtout le lundi. Matin.
Là dans le train en face de moi il y a une petite rouquine qui dort avec son abonnement SNCF dans la main et déjà ça, ce bout de papier plastifié, ça raconte une histoire. Les matins embués se lever tous les jours à 5h le paysage toujours le même qui déééééfile la voiture le train le tram le bus et la sensation en arrivant enfin à destination d'avoir accompli la moitié du but de la journée. Mais peut-être que je m'emballe et qu'elle ça lui va très bien. Un peu trop tendance à toujours imaginer des histoires à la Germinal.
Tundundun mesdames et messieurs vous êtes bien arrivés en gare de, etc... Et là il faut dire aurevoir à Pôpô, descendre touuus les escaliers jusqu'à tout en bas où la foule enragée indique que vous êtes bien sur le quai du tram. Tutut avec la badgéo et on se bat comme on peut pour rentrer (nous c'est à dire moi mon sac de cours ma housse de PC et mon sac d'habits) dans ce foutu Tram D-ARISTIDE BRIAND. Et là c'est le meilleur moment, parce que c'est le moment où je deviens strasbourgeoise, quand on sort du tunnel. C'est toujours là, et ça dure jusqu'au vendredi soir. A partir de là, le truc rigolo c'est encore d'imaginer des histoires sur les gens. Déjà les gens ils sont pas beaux dans la lumière du lundi matin. Ils ont l'air en carton. Mais par exemple, elle, elle doit avoir tout juste 18 ans, ses yeux sont encore enfantins même si elle a mis trois tonnes de khôl et dans son énorme valise violette, on devine les jeans bien repassés, les petits plats dans les tupperware avec les jours de la semaine marqués dessus, et puis bien planquée sous des couches et des couches, la petite peur hebdomadaire d'être toute seule.
Y'a elles aussi, qui sont pas mal. Elles sont trois et il y en a une qui a les cheveux noirs en pétard avec en dessous, des petites queuqueues de rat couleur "Radioactive" rose. Evidemment les deux autres ont des franges. Ecole de coiffure.
Mon arrêt. Traverser la route "en dehors des clous" (quels clous d'ailleurs) parce que c'est plus rapide, clés mais où elles sont ces putains de clés, ascenseur, reclés, blam les sacs jetés par terre, maison, maison. La semaine peut commencer.
Photo : Marseille, station Sainte Marguerite-Dromel, décembre 2008.