Veiled.
C'est parti de rien. Juste la pluie, la nuit et une otite dans l'oreille droite et Laure qui s'enturbanne dans son kefieh, l'air revanchard (marre d'être mouillée). Je suis partie de mon côté, j'avais froid, et au milieu des barres de l'esplanade, j'ai enroulé mon (faux) pashmina autour de la tête. Princesse orientale de pacotille. Voilée.
N'empêche, j'étais bien, protégée, de la pluie, des gens, du monde ; avec mes oeillères bleues et vertes. J'ai marché, je me suis dit « tu ne l'enlèves pas avant d'être chez toi », juste pour voir ce que ça fait. Personne ne m'a rien dit. Quelques regards – mais moins que les fois où je me baladais dans Strasbourg avec chapeau et rouge à lèvres rouge.
Dans le tram, je me suis rendu compte
que je me recroquevillais ; je me tenais voûtée, le
menton enfoncé dans le tissu, pliée sous la honte
d'être un fake. Un peu de peur aussi, sans doute. Mais
rien.
Après, j'ai marché, vite, jusqu'à chez
moi. C'était bizarre de voir mon ombre sur les murs, toute
ronde.
J'ai monté les escaliers. Une petite impression de flagrant délit – mais quand je me suis regardée dans le miroir, avant de redevenir moi, sans signe religieux ostentatoire, j'ai vu une fille un peu jolie, et un peu mystérieuse.
Marseille Vieux Port 2009